10 septembre 2007

Juli Zeh

C'est pour moi l'heureuse surprise littéraire de l'été. Juli Zeh (prononcer youli tsé), 27 ans, avocate vivant à Leipzig, compte parmi les jeunes écrivains allemands qui captent l'attention depuis déjà quelques années.


J'ai pour ma part commencé avec Spieltrieb (en français: La fille sans qualité). Un roman mettant en scène la rencontre entre Ada, adolescente précoce, froide et asociale, et Alev, un garçon arrogant, prétentieux et lui aussi d'une rare intelligence. Ces deux ados à l'écart échouent dans un "lycée de la dernière chance", sous les yeux de leur professeur d'allemand. Celui-ci va devenir malgré lui la proie de ces deux ados revendiquant un héritage nihiliste - dénué de toute morale ou de valeur, et voyant la vie comme un jeu perfide dont ils maitrisent les règles.

Un roman absolument génial. D'abord parce qu'il est extrêmement bien écrit. L'écriture est froide, précise, sèche et diablement efficace: elle s'adapte parfaitement aux protagonistes qu'elle met en scène, et accentue la tension dramatique.
Ensuite parce que loin d'être un simple roman sur deux ados, ce livre est aussi une réflexion sur le droit, le nihilisme, la violence physique et psychologique, le jeu, bref: ce qui réunit Ada et Alev, et ce qui nourrit leurs conversations.
Enfin parce que le roman est parfaitement construit, l'action parfaitement déroulée. On tremble jusqu'au bout comme dans un bon polar, mais au contraire d'un bon polar on ne peut s'en défaire immédiatement, parce que c'est un roman bouleversant et d'une grande intelligence.

Assez retournée par ce premier essai, j'en ai trouvé un autre très différent, mais remarquable lui aussi: Die Stille ist ein Geräusch - eine Fahrt durch Bosnien (en français: Un silence assourdissant).


Ce livre raconte le voyage de Juli Zeh et de son chien en Bosnie, pendant un mois. Elle y part pour essayer de trouver des réponses à des questions simples: pourquoi la guerre a-t-elle éclaté, et que s'est-il passé depuis? A travers le récit de son voyage, on découvre une population totalement bouleversée par l'épuration ethnique, mais aussi un pays livré à lui-même, devenu invisible et inexistant pour la communauté internationale.
Un récit très personnel, parsemé de réflexions et de remarques accumulées durant le voyage, tantôt sérieuses et documentées, tantôt fantaisistes et loufoques. Elle parle d'un pays sublime encore truffé de mines, elle raconte les stratégies pour faire monter son chien clandestinement dans les bus bosniaques, évoque le voyage et ce besoin viscéral d'aller toujours plus loin...

Voici l'intro, que je trouve très réussie. Viel Spass pour ceux qui parlent allemand...

" Der Hund guckt vom draussen druch die Glastür, die Nase dicht an der Scheibe. Wenn er Daumen hätte, würde er sie drücken. Dafür, dass es jemandem hier gelingt, mir die Idee auszureden.
Die Frau im Reisebüro teilt seine Auffassung. "Was wollen Sie dort? Da ist doch Krieg!"
Gewesen. Ich verzichte auf Richtigstellung und starre auf die Landkarte vor mir, die ich nur zu sehen bekomme, weil ich "Recherche" statt "Tourismus" sage. Einige nicht sehr grosse Länder liegen unordentlich nebeneinander, ein paar Namen von Städten und Flüssen kenne ich aus dem Zwanzig-Uhr-Nachrichten. Im Herzen des Finsternis lieht ein weisser Fleck, in dem geschrieben steht: "Dieses Land eignet sich nicht für touristische Reisen." Das ist Bosnien-Herzegowina.
Pascal hat mal gesagt, alles Unheil auf der Welt komme daher, dass der Mensch nicht ruhig zu Hause auf seinem Hintern sitzen kann.
Der Hund guckt noch immer so. Ich beschliesse, ihm wegen Illoyalität das Abendessen zu kürzen."

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Spieltrieb = La fille sans qualité
Die Stille ist ein Geräusch - eine Fahrt durch Bosnien = Un silence assourdissant

Pas compliqué la traduction : si c’est long en teuton, t’en mets trois tonnes en gaulois et lycée de Versailles...

Anonyme a dit…

Bonjour,

quoi, Juli Zeh n'a que 27 ans?! j'ai lu un super roman d'elle en 2002, elle était jeune!
tchao,

So
petitblog.jubiiblog.fr