23 octobre 2006

Un mini-aperçu de la vie politique allemande

Petit résumé de l'état d'esprit des derniers mois...

Le pays est occupé, voyez-vous, à détruire son petit miracle politique, à savoir la fameuse "grande coalition". Celle-ci regroupe Angela Merkel, CDU (= droite catho), Kurt Beck, SPD (= social démocrate) et Edmund Stoiber, CSU (=droite très conservatrice).
C'est l'an dernier que Merkel a pris la place de Gerhard Schröder; un an, c'est la période idéale pour tirer les premiers bilans.
Pourquoi parler de miracle politique? Parce que les premiers mois de la Koalition ont passé dans une certaine euphorie. Oui, les allemands sont capables de faire des compromis pour le bien de leur pays; ensemble, ils s'attaquent aux gros dossiers, s'imposent sur la scène internationale et préparent la WM ( = WeltMeisterschaft: la coupe du monde). Cerise sur le Apfelstrudel, les allemands vont jusqu'en demi-finale, et connaissent le doux climat euphorique que chacun a pu ressentir en France en 1998. Les sociologues s'enflamment, le monde observe l'Allemagne avec sympathie, et les premiers bilans tombent: l'Allemagne peut enfin être fière d'elle-même sans basculer vers un patriotisme ambigu, les allemands oublient le mur psychologique qui existe encore dans certaines têtes, et fêtent ensemble la victoire.
Eliminée, l'Allemagne? Pas de problèmes, les allemands sont fair-play, et continuent à faire la fête. Un film est tiré de cette "grande aventure", il fait naturellement un tabac ici et montre bien l'esprit qui régnait cet été: "Deutschland, ein Sommermärchen" (= Allemagne, un compte d'été; équivalent de notre "les yeux dans les bleus").L'Allemagne semble oublier ses problèmes; Merkel jubile, serre Klinsi (Jürgen Klinsmann, entraineur de l'équipe allemande) dans ses bras.Rien de tel qu'une coupe du monde pour vous redresser dans les sondages! Mais le temps passe vite! Et "Angie" décide de s'attaquer au plus difficile: la réforme du système de santé. Après des jours d'âpres négociations, les trois piliers de la coalition affichent leur satisfaction: ils ont réussi à trouver un compromis correct. Mais très vite la belle image s'effrite: Kurt Beck commence à railler Merkel dans la presse, laquelle n'apprécie pas et rétorque par médias interposés qu'il ferait mieux de soutenir la coalition, plutôt que de travailler à sa destruction. Les petites phrases vont bon train et font le bonheur de la presse.

Et puis Gerhard fait parler de lui; hé oui, ce brave Schröder, qui s'est trouvé une place au chaud dans le "buisness", décide de publier ses Mémoires. Belle stratégie de communication: cela lui permet de mettre son nez dans le premier vrai bilan de Merkel, et de s'en donner à coeur joie. Evidemment ce brave Gerhard n'est pas satisfait du tout. L'Allemagne est-elle satisfaite de Hartz IV, sa réforme du travail ultra-libérale? Je n'en suis pas très sûre. Schröder profite maintenant de son statut de "sage" retiré de toute vie politique, et tire à vue sur l'ancienne étudiante Leipzigoise qui lui a pris son trône.
Celle-ci encaisse une enième fois, mais doit faire face à la parution d'une étude publiée récemment, révèlant l'existence d'une réelle pauvreté en Allemagne, la "Unterschicht' (= couche d'en dessous).
L'euphorie retombe en Allemagne... et Merkel a la gueule de bois.

La vie [politique] n'est pas un long fleuve tranquille...

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour ce décorticage de la politique Allemande

C'est bon d'entendre d'autres bilans, à une heure où, en France, les étalages de programmes (ou faux bilans) arrivent,

Bon fourmillement Leipzigois !

Anonyme a dit…

Très intéressante cette vue d'ensemble...le ton est en effet donné. D'ailleurs pour info, Schröder présente, lors d'une lecture, son bouquin "Entscheidungen. Mein Leben in der Politik" le 3 novembre à Leipzig...les doux mots d'amour pour Angela risquent de pleuvoir !

Anonyme a dit…

ça me fait penser qu'il faut que je bosse sur les élections présidentielles françaises avec mes élèves...
au fait, tu as fait ta procuration ? moi tj pas.
bisous et continue tes piquants petits articles !

Ariane* a dit…

Non, pas encore de proc', mais on a bien le temps... je m'en occuperai en décembre/janvier, lors de mon seul - et unique! - retour à Paris.
Dompte bien tes p'tits monstres :)
biz

Anonyme a dit…

Professeure Kujawski, comment est jugé outre-Rhin l'engagement de Gerard Schröder aux côtés de Gazprom? Etes-vous d'accord avec son discours (à mon avis très recevable) sur l'impératif de la coopération entre la Russie et l'Union européenne?
Que penseriez-vous d'une candidature de Herr Stefan Gatignon au poste de Bundeskanzler?

Anonyme a dit…

... Ah, j'y pense, on s'est loupés sur MSN. En principe nous ne sommes pas là demain soir et samedi, comme tu le sais, je t'envoie un colis de grande valeur et à forte ampleur capillaire.
Je t'embrasse